Voici longtemps Elisabeth que je n'ai plus de vos nouvelles. Où avez-vous passé les fêtes ? Comment vont Tom et Isabelle ? Ici nous avons profité de la présence des enfants et nous avons dépoussiéré nos vieux souvenirs de parents.
Cécile avait fait des guirlandes rouges et dorées pour le vingt-quatre, un pudding, une truite aux amandes. Elle a revu un peu Agathe. Jean-Christophe lui ne change pas, il a ressorti ses legos. Il vient de signer un contrat pour trois années à Toronto. Ils sont repartis tout à l'heure, Cécile a cinq heures de trajet.
Ils sont repartis tout à l'heure et je repensais... Un vendredi après-midi, nous étions encore à Saint-Cloud, Pierre est rentré et il a dit : "j'ai trouvé quelque chose pour nous". Et puis nous sommes arrivés là, Cécile avait cinq ans et demi, en mille neuf cent quatre-vingt-trois, ici à Châtenay-Malabry.
Je vous écris dans le silence qui s'installe. C'est un dimanche après-midi, je suis assise dans la grande salle. Les murs de Châtenay-Malabry, les rires du passé me font mal. Ils sont partis avant midi. Chacun a sa vie, c'est normal.
Je vous écris dans les vestiges du jour de l'an. Il y aura des photographies que nous mettrons dans l'album blanc. Cécile dira à une amie : "mes parents étaient très contents, ils vivent à Châtenay-Malabry, ils s'ennuient un peu maintenant".
Voici longtemps Elisabeth que je n'ai plus de vos nouvelles.
C'est pas moi, c'est Vincent Delerm