Ces morceaux de trottoirs disent leurs dates naissance en plein Paris. Ils sont fiers comme ça, d'être apparu en 1994, ou en 2001. En creux, ils disent que celui qu'ils recouvrent est plus ancien.
Avec un peu de chance, ils provoquent des images chez les passants. Ce bout de bitume a pu être repéré par Woody Allen, chanté par Louis Garrel, foulé par Xavier et Neus dans Les Poupées Russes, fouillé par Zinedine Soualem dans Chacun Cherche son Chat.
En remontant les années sans être tout à fait lucide, on s'imagine aussi Philippe Noiret nous arrêter en bon Ripoux, plat du jour et 6 coups. On continue à l'evers et le gamin des 400 coups devenu grand nous suit discrètement, cabine téléphonique et journal. Puis il fait l'école buissonnière, en courant sur les pavés du dessous.
En divaguant carrément, on est dessiné par Sempé, on est photographié par Doisneau, on est animé dans la Panthère Rose. Et là, derrière l'immeuble certifié HQE, c'est Monsieur Hulot qui passe la tête.
La pensée s'emporte pour de solides raisons. C'est du vrai, c'est du béton et c'est gravé dessus. Les images se projettent sur cet écran gris, déroulé méthodiquement, d'un geste centenaire...